Présentation de la mission de Four Paws
La vision de FOUR PAWS/VIER PFOTEN est celle d'un monde où l'Homme traite l'animal
avec respect, empathie et indulgence. Notre mission consiste à parler au nom des
animaux sous le contrôle de l'Homme d'une voix forte et indépendante, et ce à l'échelle
mondiale
- en trouvant des solutions durables pour les animaux en détresse,
- en touchant les cœurs, en modifiant les habitudes de consommation,
- en induisant des changements dans la législation et
- en établissant des partenariats solides.
Votre organisation a-t-elle des équivalents sur d'autres continents ?
Je ne parlerais pas en termes d'équivalence. FOUR PAWS, créée en Autriche, se voulait
au départ une petite association locale en faveur du bien-être animal ; elle s'est
ensuite muée en une organisation internationale de protection des animaux possédant
des bureaux en Autriche, en Belgique, en Bulgarie, en Allemagne, en Hongrie, aux
Pays-Bas, en Roumanie, en Suisse, en Afrique du Sud, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis.
Certains projets ou missions spécifiques, tels que nos programmes de stérilisation
des animaux errants (SAC) ou de secours en cas de catastrophe (qui comprend le sauvetage
de chiens avec ou sans maîtres) impliquent une action étendue à plusieurs continents
et à pratiquement toutes les espèces animales. Il existe plusieurs autres organisations
internationales actives dans le domaine du bien-être animal, mais FOUR PAWS est
la seule entité de protection animale continentale et basée en Europe à être active
à l'échelle internationale.
L'approche diffère-t-elle beaucoup d'un pays européen à l'autre ?
Il s'agit d'une question relativement complexe, et y répondre d'une manière un minimum
satisfaisante serait trop long ; je vais néanmoins essayer de brosser un rapide
portrait de la situation. Pour commencer, en matière de bien-être animal, le cadre
légal de l'UE intègre un protocole d'accord élémentaire commun à l'ensemble des
pays européens : la première phrase de l'Art. 13 du Traité de Lisbonne/Traité sur
le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) définit expressément les animaux
comme des « êtres sensibles ». Différentes approches existent cependant en fonction
de l'histoire politico-culturelle des Etats membres et de leur dispositif légal.
Le même article stipule également que « les rites religieux, traditions culturelles
et patrimoines régionaux » doivent être pris en compte. Malheureusement, ces dérogations
ne sont pas opérationnelles faute de définition juridique ; ces aspects doivent
être intégrés à la législation.
En ce qui concerne les chiens, on observe un certain gradient nord-sud et est-ouest
; je suis certaine que vous avez entendu parler de la surpopulation canine et féline.
Malheureusement, dans certains Etats membres, il y a un énorme marché là derrière
– le crime organisé lui-même n'y est pas étranger –, ce qui rend difficile la mise
en œuvre de solutions durables (déjà existantes et financées). De plus, certains
Etats membres, eu égard aux différences historiques en matière de systèmes juridiques,
autorisent encore l'abattage des animaux en bonne santé – pas uniquement à des fins
alimentaires ou industrielles, mais aussi quand ceux-ci sont en surnombre, dans
les refuges par exemple; il s'agit d'un procédé désormais réprouvé et, dans la plupart
des Etats membres d'Europe continentale, tuer un animal en bonne santé est strictement
interdit. Plus particulièrement, certains des nouveaux Etats membres disposent de
leurs propres lois en matière de protection animale, qui interdisent l'abattage
en masse des chiens, appelé « euthanasie » – un terme par ailleurs inapproprié,
comme l'ont souligné plusieurs conférences d'experts –, et même de stratégies en
vigueur dans la pratique, comme c'est le cas en Bulgarie par exemple. A ce stade
se pose la question de l'application de la loi – et ça, c'est une autre histoire
! Cette différence d'interprétation est parfois source de problèmes. Qui plus est,
comme nous l'avons déjà dit, cela conduit à un commerce malsain basé sur les animaux
errants, les fermes de chiots ou l'élevage illégal de chiens de combat.
D'après vous, qu'ont en commun la FCI et votre organisation ?
Nos deux organismes respectent les chiens pour ce qu'ils sont : des animaux admirables
proches de nous, les êtres humains. Et nous croyons en la responsabilisation des
propriétaires de chiens. Cela signifie que nous poursuivons les mêmes objectifs
:
- pas de souffrance animale
- pas de chiens vivant dans les rues
- pas de chiens sans maître ou abandonnés
- uniquement des chiens appartenant à des propriétaires correctement formés et informés
- uniquement des éleveurs sérieux – pas d'élevage illégal
- limiter le commerce des chiens à un niveau minimal et légal
En d'autres termes, j'entrevois un défi de taille pour nos deux organisations :
lutter ensemble contre l'élevage illégal de chiots en fermes, qui cause d'énormes
souffrances aux animaux et inonde l'Europe de chiens le plus souvent issus d'animaux
malades et/ou de chiens séparés de leur mère avant d'avoir été socialisés. Nous
devons informer les clients et les convaincre de ne pas acheter un chien dans un
supermarché, sur un marché non réglementé, sur un parking ou auprès de toute autre
source douteuse, par exemple sur Internet.
Quelles sont vos priorités actuelles ?
En ce moment, nous travaillons aux trois réseaux et sites web que nous avons créés
et mis sur pied avec des partenaires de premier ordre :
www.carodog.eu,
www.carocat.eu
et le réseau d'application des lois
www.lawyersforanimalprotection.eu
Nous menons notre campagne internationale de conscientisation à la lutte contre
le commerce illégal des chiots, et nous préparons actuellement des stratégies d'étiquetage
UE des produits contenant des œufs transformés. Nous préparons également une conférence
d'experts intitulée « Wild animals in capitivity – welfare, law and enforcement
» (Animaux sauvages en captivité – bien-être, législation et application) qui se
tiendra à Bruxelles le 19 juin de cette année en collaboration avec la Fondation
Born Free ; bien entendu, nous poursuivons nos activités de consultance politique
au sein de plusieurs comités de la Commission européenne et de l'organisme de tutelle
Eurogroup pour les animaux. D'une manière générale, c'est nous qui, en tant qu'organisation
de défense du bien-être animal basée à Bruxelles, nous occupons spécifiquement des
questions d'application de la législation au niveau de l'UE (voir les sites web
respectifs : ils regorgent d'informations).
Quelles sont, selon vous, les menaces/opportunités principales pour les chiens dans
notre société actuelle ?
Le chien est notre meilleur ami, le plus fidèle – c'est aussi l'animal domestique
le plus ancien.
Mais commençons par l'aspect négatif des choses : comme je l'ai déjà dit, les risques
résident en partie dans les cas où les chiens sont considérés non pas comme des
« êtres sensibles », mais uniquement comme des objets ou des jouets qu'on peut jeter,
voire pire encore, comme des « déchets » encombrant les rues en quelque sorte (effectivement,
dans certains Etats membres, les services chargés de la collecte des immondices
ramassent en réalité les chiens errants dans les rues), quand ils ne sont pas tués
de manière cruelle, empoisonnés ou battus. L’autre risque réside dans l'extrême
inverse, quand les chiens se voient imposer de remplir le rôle d'un être humain
– celui d'un enfant ou d'un conjoint par exemple – et affubler d'accessoires typiquement
humains tels que des vêtements à la mode, des chapeaux, des lunettes, etc. Nos meilleurs
amis sont des êtres sensibles à part entière et nous – les êtres humains – devons
apprendre à connaître et à respecter leur comportement naturel, leurs besoins et
le caractère propre à leur race. Les chiens ne sont pas seulement des compagnons
de promenade ou de jeu, ni un succédané de contact humain ; ils sont importants
pour notre âme et notre santé mentale. Cela va même plus loin : certaines études
scientifiques démontrent que les chiens ont la capacité d'améliorer concrètement
la santé physique des êtres humains (d'intéressants exposés ont été faits à ce sujet
lors du séminaire de la FCI à Bruxelles en novembre 2011). Ils jouent en outre un
rôle de plus en plus important en thérapie. FOUR PAWS a également mis sur pied un
projet en ce sens : nous sélectionnons actuellement (à l'aide de professionnels)
des chiens de race et des bâtards, même parmi les chiens errants, que nous intégrons
à des programmes de thérapie par les chiens. Nous les emmenons voir des enfants
autistes en Roumanie, des personnes âgées dans des homes et des hôpitaux, des écoliers
que nous initions au contact avec les chiens. Les chiens travaillent pour nous,
également : ils détectent la drogue aux frontières ; ils nous protègent, ainsi que
nos maisons, et gardent nos troupeaux de moutons depuis des dizaines de milliers
d'années. Autant de raisons de leur accorder la place qui leur revient en tant qu'animaux
aussi précieux que merveilleux.
Permettez-moi de conclure sur une citation que j'affectionne particulièrement ;
elle est de Konrad Lorenz, le scientifique et comportementaliste autrichien : «
Le besoin de posséder un animal prend sa source dans une aspiration ancestrale :
le désir que tout être humain civilisé a du paradis ».
Quel genre d'événements organisez-vous, et pour quel public ?
A l'échelle de l'UE, nous organisons des conférences d'experts réunissant décideurs,
autorités compétentes, vétérinaires, hommes de loi, ONG et autres groupes d'intérêt
dans un but de partage de connaissances et de recherche de solutions (voir notre
site web :
www.vier-pfoten.eu, catégorie « conférences
»). Nous organisons des tables rondes et des groupes de travail autour de ces questions.
Pouvez-vous nous parler de CAROdog ?
Le site web a pour objectif d'attirer l'attention sur les responsabilités liées
à la possession d'un chien et de mettre un terme au calvaire des chiens errants,
le but ultime étant de limiter le nombre de chiens dans la société à un seuil optimal
– des chiens qui ont un maître, uniquement. Nous fournissons des données factuelles
dans un cadre structuré, qui illustrent ce qui fait un maître responsable :
- éducation, information, formation
- prévention vétérinaire
- contrôle systématique des naissances
- identification et enregistrement au sein d'un système UE adéquat
- éleveurs agréés et enregistrés (afin de repérer les éleveurs sérieux)
- commerce légal uniquement
Nous modifions actuellement la présentation de nos instruments juridiques nationaux
afin de les rendre plus accessibles, ce qui doit permettre à l'utilisateur de comparer
plus facilement entre eux les différents systèmes législatifs nationaux et les règlements
applicables à l'espèce canine au sein des Etats membres de l'UE. Nous espérons avoir
terminé pour le 1er mai.